Rapport intermédiaire du projet COVID-19 TiO2Mask

Last updated on 28-10-2021 by Wesley Van Dessel

Résumé exécutif

Le dioxyde de titane (TiO2) est généralement utilisé dans les produits textiles commerciaux. Cette étude a examiné in situ si des (nano)particules de TiO2 sont présentes dans une sélection de masques faciaux disponibles pour la population générale. En outre, une analyse préliminaire des risques a été réalisée, se concentrant sur les risques potentiels pour la santé associés aux particules de TiO2 dans les masques sélectionnés, en supposant un scénario d‹ «utilisation intensive» (conformément aux conseils du gouvernement belge pour l’utilisation des masques contre la contamination par le Covid-19) et une exposition subchronique (expositions multiples ou continues se produisant pendant une partie limitée de la vie d’une personne) de la population générale adulte.

Présence de dioxyde de titane dans les masques faciaux

Une analyse in situ a démontré la présence de (nano)particules de TiO2 agglomérées dans tous les masques examinés qui contiennent des fibres de polyester ou de polyamide (nylon), ou qui sont faits de tissus synthétiques non tissés. Ces particules ressemblent à des particules de TiO2 utilisées dans la production de fibres (“fibre-grade” TiO2).  Les quantités de TiO2 dans les masques faciaux variaient de quelques microgrammes à 0,15 gramme par masque. Les particules de TiO2 observées sont situées à la fois à la surface et au cœur des fibres textiles. Les preuves scientifiques actuelles montrent que le potentiel de migration des particules provenant du cœur de la fibre est extrêmement rare. Les particules situées à la surface externe des fibres pourraient toutefois être potentiellement libérées et ensuite inhalées. Sur la base de ces données, une première évaluation des risques a été réalisée..

Évaluer les risques potentiels pour la santé

En l’absence de méthodes permettant de mesurer directement l’exposition, nous avons appliqué la méthodologie de l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) pour déterminer les limites d’exposition aux particules de TiO2 nanométriques. Un niveau d’exposition acceptable (Acceptable Exposure Level — AEL) par masque de 3,6 µg a été calculé à partir d’un scénario d’utilisation intensive des masques. Pour chaque masque, nous avons comparé l’AEL par masque avec la quantité de TiO2 à la surface de la fibre. Nos calculs montrent que l’AEL est dépassé pour la plupart des masques faciaux examinés, et un risque potentiel pour la santé ne peut être exclu lorsqu’ils sont utilisés de manière intensive. Cependant, il faut noter qu’il s’agit d’un risque théorique, et non d’un risque avéré basé sur des données d’exposition réelles.

De nombreuses incertitudes concernant le degré d’exposition subsistent dans notre évaluation.  Nous avons adopté une approche toxicologique prudente (conservatrice). Jusqu’à présent, la recherche sur les particules de TiO2 dans les textiles et en particulier sur leur libération, est extrêmement limitée, mais actuellement, nous n’avons aucune indication que les particules de TiO2 sont effectivement libérées en grandes quantités.

Dans certains masques faciaux, cependant, la quantité de dioxyde de titane est si élevée qu’un risque pour la santé ne peut être exclu, même si l’on considère que seule une petite fraction des particules de TiO2 à la surface est libérée et inhalée. En outre, l’EFSA a conclu que le TiO2 ne peut plus être considéré comme un additif alimentaire sûr, car on ne peut exclure la possibilité de dommages potentiels au matériel génétique du consommateur (génotoxicité). Nous conseillons donc d’émettre des normes de précaution pour limiter la présence de particules de TiO2 dans les masques faciaux. Dans le cadre de la prévention de la propagation du COVID-19, nous soutenons les recommandations émises par les autorités concernant l’utilisation de masques faciaux.

Recherches en cours et futures

Dans la prochaine phase du projet, nous avancerons dans le développement de méthodologies permettant d’évaluer l’inhalation de particules de TiO2 en imitant les conditions réelles ou en développant des techniques alternatives pour mesurer la libération de particules de TiO2 par les masques faciaux. Nous allons également poursuivre la caractérisation des particules de TiO2 afin de mieux comprendre le danger lié aux particules, puisque leur toxicité dépend de leurs propriétés physico-chimiques.

Au cours du projet actuel, nous avons identifié plusieurs défis majeurs liés à l’analyse, à la caractérisation et à l’évaluation des risques du TiO2,  qui vont au-delà de la portée du projet de recherche en cours :

  • En général, les données scientifiques sur la présence de nanoparticules dans les masques faciaux, leurs caractéristiques, l’exposition et les risques pour la population sont limités.
  • Les méthodologies permettant de caractériser les particules de TiO2 dans les masques faciaux sont longues et coûteuses. Par conséquent, dans le cadre du projet actuel, seul un échantillon limité de masques faciaux sur le marché a été analysé. Une étude de marché systématique devrait être entreprise. En outre, des efforts sont nécessaires pour renforcer les capacités de caractérisation et d’analyse des particules de TiO2 dans les biens de consommation et les dispositifs médicaux.
  • L’étude de Sciensano actuelle sur les masques destinés à la population générale devrait être étendue pour évaluer les risques potentiels pour la santé associés à la présence de particules de TiO2 dans les masques faciaux portés par le personnel médical.
  • Des informations clés sur la toxicité des particules de TiO2 manquent pour l’évaluation des risques : les données sur le danger (seuil de toxicité par inhalation) des particules spécifiques de TiO2 présentes dans les masques faciaux devraient être déterminées dans une étude robuste d’inhalation de doses répétées, avec des particules de TiO2  « fibre-grade ». En outre, davantage de recherches médicales et de toxicité sont nécessaires pour évaluer le risque des populations vulnérables, en particulier les enfants.
  • Des méthodes et des matériaux de référence, y compris la désignation d’un laboratoire de référence pour l’analyse et la caractérisation des nanoparticules, sont nécessaires de toute urgence pour le contrôle de la qualité et l’application de la législation.
  • Le partage des méthodologies nouvellement développées peut permettre de mieux cerner le problème au niveau belge, mais la présence de TiO2 dans les masques est un problème global. Une solution nécessitera donc au moins une approche européenne commune.

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